Anomalies des membres inférieurs, faut-il s'inquiéter?

La médecine pédiatrique et ses pratiques cliniques sont en constante évolution, bénéficiant des avancées de la science à la suite des nombreuses recherches médicales dans divers domaines. Pourtant, certaines anomalies associées aux étapes du développement de l’enfant suscitent toujours les mêmes préoccupations chez les parents… et les médecins les expliquent encore avec les mêmes données cliniques qu’aux premiers balbutiements de la médecine pédiatrique. 

L’asymétrie des jambes ou des pieds de l’enfant inquiète souvent les parents. On pourrait presque parler ici de « croyances populaires » en ce qui concerne tous les questionnements que cette anomalie suscite. Dans la plupart des cas, ces asymétries, liées à la croissance normale de l’enfant, vont être corrigées grâce aux « petits conseils d’autrefois » ou « trucs de grand-mère », qui représentent souvent les meilleures solutions à envisager pour la résolution d’un problème concernant les membres inférieurs.

Dans le suivi de santé de l’enfant, le rôle du médecin est de dépister les anomalies de développement ou de croissance des jambes ou des pieds, en lien avec l’âge de son patient. À cet égard, dans une approche préventive, il est indiqué de s’intéresser au problème des asymétries des membres inférieurs bien avant que celles-ci ne nécessitent une intervention orthopédique invasive.

La majorité des anomalies des membres inférieurs vont se résorber d’elles-mêmes, puisqu’elles sont souvent reliées au développement normal du squelette de l’enfant.

Différents types d'anomalies

Le genu varum
La position des jambes arquées vers l’extérieur est normale avant l’âge de 18 mois et ne nécessite aucun traitement, sauf dans le cas où la déformation persisterait au-delà de l’âge de 2 ans.

Le genu valgum
Les jambes arquées vers l’intérieur (avec les genoux rapprochés l’un de l’autre) est une condition normale chez de nombreux enfants âgés entre 2 et 7 ans. On observe que cette asymétrie atteint un « pic de sévérité » autour de l’âge de 4 ans, sans qu’aucun traitement ne soit indiqué dans la plupart des cas.

Pour le genu varum ou le genu valgum, si une déformation persiste à une seule jambe, il est indiqué de procéder à une imagerie médicale pour éliminer d’autres causes non physiologiques.

L’exogyrisme
La rotation souple des pieds vers l’extérieur (exogyrisme fonctionnel) est observée lorsque l’enfant commence à se tenir debout, car cette position des pieds lui permet d’améliorer la stabilité de son équilibre. Cette asymétrie diminue naturellement avec le perfectionnement autonome de la marche. Le calcaneovalgus est une rotation extérieure rigide du pied et peut quant à lui nécessiter des plâtres correcteurs.

L’endogyrisme

La position de la jambe en rotation vers l’intérieur est fréquente chez l’enfant. Cette asymétrie est influencée par la génétique, la position dans l’utérus, le sexe et la laxité des ligaments.

On observe trois causes distinctes reliées au phénomène de l’endogyrisme : l’antéversion fémorale, la rotation interne du tibia et le métatarsus adductus.

L’antéversion fémorale : À la naissance de l’enfant, ses hanches sont naturellement en rotation vers l’intérieur. Vers l’âge de 2 ans, cette position de ses hanches peut entraîner un début de rotation de toute sa jambe vers l’intérieur, et cette asymétrie peut progresser quand il aura entre 4 et 6 ans.

La torsion tibiale interne : En raison des différentes phases du développement des jambes du fœtus, il est fréquent que le tibia du bébé, à sa naissance, soit en rotation vers l’intérieur. On remarque même une incidence plus élevée pour la jambe gauche quand c’est lié à la position dans l’utérus. Cette rotation est relativement normale jusqu’à l’âge de 18 mois. Cependant, au-delà de cette période et selon la sévérité, une barre de dérotation nocturne peut être indiquée pour corriger cette asymétrie.

Le métatarsus adductus : Il s’agit d’une déformation souple des pieds vers l’intérieur, observée à la naissance, et causée par la position du fœtus dans l’utérus. Cette condition se corrige d’elle-même autour de l’âge de 3 mois. Au-delà de cet âge, si la déformation persiste, il est possible que des plâtres, des orthèses ou des souliers correcteurs soient nécessaires pendant quelques mois. Le pied bot est pour sa part une déformation rigide du pied, corrigée à l’aide d’une chirurgie dès la naissance.

Pied plat
Une personne sur cinq peut avoir une arche plantaire plus ou moins développée sans que cette situation cause des problèmes à sa posture ou qu’elle provoque des douleurs musculaires. Le pied plat flexible représente la phase normale du développement de l’arche plantaire de l’enfant : environ 95 % des enfants de 2 ans ont les pieds plats, comparativement à 5 % des enfants lorsqu’ils sont âgés de 10 ans. Les orthèses ne préviennent en aucun cas la persistance des pieds plats chez la plupart des adultes.

Pied creux
La position persistante et rigide du pied creux qui augmente la cambrure plantaire est très rare chez l’enfant et elle nécessite en tout temps une consultation chez un spécialiste.

Pied équin
Pour un enfant de moins de 3 ans, des épisodes où celui-ci marche sur la pointe des pieds peuvent être une étape normale dans son apprentissage de la marche. Au-delà de cet âge, si cette habitude persiste, il pourrait y avoir un lien avec le manque de souplesse du tendon d’Achille, une condition souvent due à la génétique qui peut être corrigée par des traitements physiologiques non invasifs.

Mieux vaut prévenir
Au moment du bilan de santé de leur enfant (dès qu’il commence à marcher et jusqu’à ce qu’il ait l’âge de 4 à 7 ans), les parents peuvent bénéficier de multiples informations quant à la position de ses pieds ou de ses genoux. Les croyances populaires peuvent souvent s’avérer contradictoires pour ce qui est des conseils sur les problèmes des jambes de l’enfant. Cependant, les conseils qui suivent, faciles à appliquer, font généralement l’unanimité :

• Au moment de l’apprentissage de la marche, il est préférable de déchausser le bébé le plus souvent possible afin de permettre le développement dynamique musculaire de l’arche plantaire.
• Dès que l’enfant se tient en position assise prolongée, il est important de corriger la position de ses jambes si elles sont repliées en « W » et qu’il les place de côté. Cette habitude très fréquente peut persister jusqu’à l’âge de 6 ans, car elle offre une grande stabilité à l’enfant.
• Lorsque l’enfant est âgé d’environ 1 an et qu’il a l’habitude de dormir les genoux repliés sous son ventre, il est indiqué d’essayer de lui faire changer sa position et d’allonger ses jambes.
• Un vieux truc transmis de génération en génération (qui n’est pourtant pas documenté dans la littérature médicale), en plus d’être un conseil qui est souvent donné par les médecins ou les infirmières pour corriger un pied tourné vers l’intérieur (endogyrisme), est d’inverser le port des chaussures, jusqu’à ce que la symétrie de position soit atteinte pour les deux pieds.

L’apport de l’ostéopathie
L’ostéopathe spécialisé en pédiatrie maîtrise la connaissance du développement du système musculo-squelettique afin de prévenir et de traiter les structures affectées par les transformations liées au développement du fœtus et à sa position dans l’utérus. L’ostéopathie est une approche thérapeutique globale du corps. À cet égard, la spécificité de l’ostéopathie est de traiter l’ensemble des régions du corps qui subissent des transformations importantes durant les nombreuses périodes de croissance de l’enfant.

Lors de sa première rencontre avec un nourrisson ou avec un enfant qui est rendu à l’étape de l’apprentissage de la marche, l’ostéopathe spécialisé en pédiatrie profite de l’occasion pour faire une évaluation globale et précise de l’ensemble du squelette et de la musculature de l’enfant. Au moment de cette évaluation, il est fréquent qu’il découvre le début d’une prédisposition à une asymétrie (parfois liée à la génétique) qui pourrait progresser vers une anomalie des pieds ou des genoux.

Entre le moment où l’enfant marche et jusqu’à l’âge de 7 à 9 ans, ses membres inférieurs vont subir des adaptations de croissance très importantes, lesquelles vont influencer sa posture finale à l’âge adulte. Un travail de prévention devrait être pratiqué afin d’identifier le plus tôt possible une asymétrie structurelle de croissance et ainsi en réduire les impacts potentiels dans le développement. L’ostéopathe pourra enfin enseigner des exercices aux parents (pour leur nourrisson), ou à l’enfant, afin de les impliquer dans l’amélioration de l’anomalie, d’optimiser le traitement et ultimement de réduire le nombre de leurs visites en clinique.

CAMILLE BERNARD
Ostéopathe DO
Clinique d’ostéopathie Camille Bernard

www.camillebernardosteopathe.com

Camille Bernard se spécialise auprès des nouveau-nés et des femmes enceintes. Les infirmières, les sages-femmes et les médecins la recommandent à leurs patients, pour des traitements en ostéopathie. Elle a rédigé un mémoire de maîtrise sur les asymétries crâniennes du nourrisson. Elle a été marraine d’allaitement pour Nourri-Source pendant plus de 23 ans.

Par Camille Bernard

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