L'hypnose pour comprendre et mobiliser les ressources de votre enfant

Plusieurs ont une perception erronée de l’hypnose, se référant à l’hypnose de spectacle où le sujet semble soumis à la force de conviction de l’hypnotiseur. Même si je ne suis pas fan de ce type de prestations, étant confrontée aux préjugés négatifs que cela apporte à ma profession, je dois tout de même avouer qu’il m’est arrivé d’en rire. Mais l’hypnose, ce n’est pas que ça ! L’hypnose thérapeutique, ça vous dit quelque chose ?

Ainsi, je crois qu’il est important de faire la distinction entre l’hypnose de spectacle, qui a pour but de divertir, de faire rire, et l’hypnose thérapeutique, qui a pour but d’accompagner l’autre à atteindre ses objectifs, à remplacer des habitudes ou, encore, des pensées limitantes en comportements adaptés et aidants au quotidien. L’hypnose thérapeutique est un travail en profondeur, qui est d’ailleurs utilisé dans les hôpitaux, en cabinet, par des médecins, dentistes, psychologues… et est au cœur de bon nombre d’études scientifiques en neurosciences. L’hypnose thérapeutique est donc soutenue par un code de déontologie, un cadre éthique sérieux, ce qui est rarement le cas en hypnose de spectacle.

C’est quoi l’hypnose ?
Patricia D’Angeli et ­Olivier ­Lockert expliquent que « le mot “hypnose’’ est le terme compliqué que l’on utilise avec les adultes pour les convaincre de replonger en ­eux-mêmes, comme ils savaient très bien le faire, enfants ». Replonger en soi, c’est partir à la connaissance de soi, de ses forces, de son fonctionnement face aux aléas de la vie, mais, surtout, c’est faire la connaissance de la partie la plus importante en soi, celle qu’on appelle l’inconscient. D’ailleurs, ­Freud disait que « l’inconscient est une “autre scène’’ dissimulée aux regards, où se joue notre existence ». Maintenant, imaginez détenir la clé de cet espace, avoir accès à cette partie qui sait ce qui est le mieux pour vous, en utilisant son langage. Eh bien, c’est exactement ce que vous permet l’hypnose !

Et chez l’enfant ?
Des études montrent que les enfants sont globalement plus réceptifs à l’hypnose que les adultes : ils peuvent en effet facilement se concentrer et fixer toute leur attention sur l’instant présent, et aussi passer rapidement de la réalité au monde magique. Et puisque l’enfant est très souvent en transe naturelle et que ses filtres personnels sont authentiques, qu’ils ne sont pas aussi segmentés et cadrés que ceux de l’adulte, sa carte du monde reste plus flexible et ouverte aux changements.

Utiliser l’hypnose chez l’enfant, c’est entrer dans son monde par le jeu, en employant son langage, des images qu’il comprend, pour découvrir ses perceptions et sa compréhension du monde. Avoir accès à cette partie de lui permet au thérapeute de mieux comprendre quels sont ses mécanismes d’apprentissage, ce qui motive sa prise de décision, ce qui génère de la motivation, etc.

Les métaphores
Chez les adultes, comme chez les enfants, les histoires métaphoriques ou métaphores (histoires qui expriment un message profond, plus vaste, caché à notre logique immédiate) sont des outils très intéressants à utiliser, car elles permettent de capter l’attention et, ainsi, de déjouer la partie consciente qui tente constamment de rationaliser et de déjouer certaines résistances bien ancrées. Le thérapeute aura alors accès à la partie inconsciente de l’enfant, la partie qui souhaite apprendre et collaborer. En utilisant, entre autres, la métaphore, le thérapeute pourra aider l’enfant à mettre en lumière ses forces intérieures afin d’y puiser les ressources nécessaires aux défis que la vie placera sur sa route.

La dissociation et le « faire comme si »
L’hypnose, c’est aussi amener l’autre à se dissocier du problème, de ses difficultés, de ses émotions limitantes, afin de ne plus avoir le nez collé sur ces derniers. Cela permet de trouver plus facilement des solutions et de s’ouvrir sur des perspectives ­jusque-là inaccessibles. En hypnose, on utilise le « faire comme si… ». Puisque l’inconscient ne peut faire la différence entre ce qu’il est en train de vivre et ce qu’il imagine, le « faire comme si » permet d’imaginer un endroit sécurisant, un refuge qui nous protège de la douleur (particulièrement chez les patients hospitalisés). Le « faire comme si » utilise l’imagination pour créer de nouveaux liens neuronaux et ainsi développer des compétences qu’on ignorait posséder ou, encore, faire monter à la conscience de nouvelles idées, des solutions aux problèmes rencontrés.

Je vous propose d’expérimenter le « faire comme si » avec votre enfant en utilisant les exemples qui suivent. Vous aurez besoin de trois feuilles et de crayons de couleur.

1. Remettez la feuille numéro un à l’enfant en lui demandant de dessiner son problème ;
2. Remettez-lui ensuite la feuille numéro trois et ­demandez-lui de se dessiner une fois le problème résolu ;
3. Terminez en lui remettant la feuille numéro deux et en lui demandant de dessiner quel(s) moyen(s) il a utilisé(s) afin de se sentir comme sur la feuille numéro trois.

Vous verrez, « faire comme si » la situation était réglée lui permettra de créer les connexions neuronales nécessaires à la résolution de son problème. Du même coup, il développera son sentiment de compétence, il portera un regard plus juste sur la situation et se responsabilisera face à ses choix.

Pour les adultes et les enfants de plus de 8 ans, je me sers d’une boîte remplie d’objets variés (personnages d’enfants, vieux tissus, blocs ­Lego, brosses à dents, toutous, cuillères, etc.) et je propose ces trois étapes : 

1. Choisis un objet qui représente bien ton état actuel et explique pourquoi ;
2. Choisis un objet qui représente ce que tu souhaites à la place et explique ce qu’il représente ;
3. Choisis un objet qui représente la ou les ressources dont tu as besoin pour atteindre ton but.

Maintenant… la transe
Être en hypnose, c’est être en état de conscience modifiée ; on parle alors d’état de transe. L’état de transe peut être comparé aux nombreux moments dans la journée où nous sommes en totale concentration. Être en transe, c’est un peu comme lorsque nous avons une discussion passionnante avec un collègue en marchant vers notre restaurant préféré. Nous ne sommes plus tout à fait conscient de ce qui se passe autour de soi. Durant ces instants, nous sommes totalement captivé par nos pensées ou notre activité. Certains diront qu’ils n’ont pas vu le temps passer, qu’ils ne ressentaient pas le froid, qu’ils n’ont pas vu la route défiler, qu’ils ressentaient une grande détente ou encore que des images et des solutions montaient en eux, sans effort ou censure.

Attention, il peut être frustrant d’être tiré de l’état de transe ! ­Rappelez-vous la dernière fois où vous étiez « dans la lune » : votre ­bien-être, le sentiment qu’il n’y avait plus de charges sur vos épaules, le fait que vous ne ressentiez plus ce point de douleur au milieu du dos, etc. Maintenant, imaginez demander à votre chérubin, qui est un être de plaisir et qui est complètement absorbé par son jeu, d’arrêter son activité pour partir à la garderie. Cette demande pourrait susciter une certaine colère, voire une frustration qui l’amènera à refuser toute collaboration, à faire la sourde oreille et même à manifester sa colère par une crise phénoménale et incompréhensible pour l’adulte que nous sommes devenu. Mais, ­saviez-vous que vous pourriez utiliser un langage hypnotique, qui favoriserait la collaboration de votre enfant ? ­Absolument ! ­Grâce à ce qu’on appelle en hypnose le « ­yes-set ». Il vous suffit d’obtenir plusieurs « oui » (au moins cinq) l’un à la suite de l’autre ; ensuite, il ne vous reste qu’à formuler votre demande pour voir votre enfant obéir.

Voici un exemple.

1. Tu as bien mangé, mon chéri (= oui), maintenant tu peux sortir de table. L’enfant quitte la table ? (= oui) ;
2. Tu es déjà habillé ? (= oui) ;
3. Tu joues avec ton nouveau camion rouge, j’imagine ? (= oui) ;
4. Je sais que tu es très content qu’on te l’ait acheté. (= oui) ;
5. Tu pourras l’apporter dans la voiture pour aller à la garderie. (= oui) ;
6. Maintenant, mets ton manteau et tes bottes, nous partons !

Vous ne devez obtenir aucun « non » entre les « oui », sinon vous devrez recommencer. ­Essayez-le, vous verrez à quel point c’est facile ! ­Je ne suis pas en train de vous dire que l’hypnose est une baguette magique (même si elle en crée chez chacun de nous) et que, grâce à quelques séances, vous aurez reprogrammé la ­carte-mère de votre enfant pour l’enfant modèle que vous auriez aimé mettre au monde. Mais, je dois tout de même vous confier qu’à la maison, les départs du matin ont radicalement changé ! ­Terminé les phrases stériles et sans impact ! ­Ma communication est enrichie, je respecte les besoins de mon enfant tout en l’outillant à mieux répondre aux exigences du quotidien.

En terminant, je vous rappelle que l’hypnose est un outil puissant ; il est donc de votre devoir de vous assurer que l’intervenant qui vous accompagnera ait une éthique de travail irréprochable. Vérifiez ses qualifications et ­assurez-vous de son professionnalisme, et bonne rencontre avec ­vous-même !

ANABEL LÉVESQUE
Éducatrice spécialisée, coach familial et diplômée en hypnose Membre du Réseau Nanny secours

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Par Anabel Lévesque

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