Le passage au lit de grand

Le changement de lit, soit de la couchette au lit de grand, est un événement marquant dans la vie de l’enfant et de ses parents. Cependant, si on ne s’y est pas bien préparé, ça peut vite tourner au cauchemar !

Bien entendu, ce changement peut aussi se vivre sans difficulté (et c’est d’ailleurs fréquent), c’­est-à-dire que notre grand se couche dans son nouveau lit et y dort comme s’il était encore dans son lit à barreaux. Certains enfants vont même continuer d’appeler leur parent le matin pour être levés, comme s’ils n’avaient jamais réalisé qu’ils pouvaient maintenant sortir du lit à leur guise. En fait, tous les parents souhaitent ce genre d’expérience. Mais ce n’est pas toujours le cas.

Voici quelques points de repère pour mieux s’y préparer et vivre ce changement de façon harmonieuse.

À quel âge doit-on faire ce changement ? Généralement, c’est autour de 30 mois. L’enfant est alors assez âgé pour bien saisir ce qu’on attend de lui, une fois les nouvelles consignes expliquées. ­Rassurez-vous, si vous l’avez fait plus tôt, cela ne cause pas préjudice à l’enfant, mais cela peut ­peut-être compliquer la tâche des parents, qui doivent parfois devenir très créatifs pour s’assurer que leur enfant demeure au lit.

Pour quelle raison ce changement doit-il survenir ? ­Parce qu’il grandit, tout simplement. Au même titre que le biberon devient un gobelet et que la couche devient une culotte. Même si le passage de la couchette au lit de grand arrive plus tard que l’âge de 30 mois, ­rassurez-vous, l’enfant ne s’est pas senti emprisonné durant cette étape, puisque, pour lui, c’est un environnement connu et rassurant avec une odeur qu’il affectionne : la sienne !

Quel est le meilleur moment pour effectuer ce transfert ? ­Le meilleur moment est lorsque la vie de l’enfant est bien « rangée » et qu’il est santé. C’est donc préférable après les vacances, et non avant lorsque c’est le ­branle-bas dans la maison avec les préparatifs ; et encore moins au moment de l’arrivée d’un nouveau bébé, car il y a parfois une régression dans les habiletés et les acquis du plus vieux lorsque le petit dernier se présente dans sa vie. Enfin, il faut aussi éviter de procéder à la transformation de son lit lors du changement de groupe en garderie (fréquent vers la fin août/début septembre), car l’adaptation avec la nouvelle éducatrice et le moment de la sieste peuvent causer de la fatigue. Plus l’enfant est fatigué, moins il arrive à bien dormir.

Points importants : 
1.
 Impliquez-le, s’il a de l’intérêt, pour le choix du motif de la douillette, d’un oreiller (un petit oreiller fait bien l’affaire au départ), de la literie et du modèle de lit (il en existe tellement de jolis, tout aussi invitants les uns que les autres !).

2. Évitez le lit double. En effet, une (trop) grande surface pour dormir peut gêner l’enfant. Si vous n’avez pas le choix, par exemple si la couchette se transforme en lit double, vous pouvez y mettre tout le tour une couverture roulée pour diminuer la surface de sommeil.

3. Dans la mesure où cela est possible, conservez la couchette et le nouveau lit d’appoint dans la même pièce. L’enfant peut ainsi apprivoiser son nouveau lit (en faisant semblant d’y dormir et non pas en y jouant) sans devoir y dormir tout de suite. Vous pouvez lui permettre d’y dormir une nuit sur deux. Mieux vaut débuter par les nuits, c’est plus facile que pour les siestes.

Pour les petits téméraires
Vous soupçonnez que bébé peut enjamber son lit à barreaux alors que le matelas est au niveau le plus bas. Vous avez deux options : vous pouvez retirer un côté de la bassinette et mettre une petite barrière sur le côté du lit, pour sa sécurité, ­ET à l’entrée de sa porte de chambre pour éviter de voir votre ­tout-petit se promener dans des pièces moins sécurisées durant votre sommeil ou pendant la soirée ; ou, s’il est très jeune (20 mois et moins), vous pouvez le faire dormir dans une gigoteuse (sleep sack), dont la fermeture éclair est protégée par un ­bouton-pression qui ferme sous le bras. Ainsi, votre bébé, même très débrouillard, n’arrivera pas à la retirer et ne pourra plus écarter suffisamment les jambes pour enjamber, même s’il peut encore très bien se mouvoir (s’asseoir, se tourner, marcher dans le lit).

Il arrive parfois qu’un enfant, qui a des difficultés de sommeil, se mette à très bien dormir dès qu’il dort dans un lit de transition. Pourquoi ? J’aimerais bien vous le dire, mais il faudrait comprendre sa perception pour y arriver, et il n’est pas en âge de l’expliquer. Certains parents sont donc tentés de changer le lit de leur enfant sans préavis pour voir les nuits s’améliorer. Si de meilleures nuits apparaissent, tant mieux. Si ce n’est pas le cas, c’­est-à-dire qu’on se retrouve avec un enfant qui dort mal et se relève en plus, il est suggéré de le remettre dans son lit à barreaux avant que toute la famille ne soit sur le carreau et d’attendre le retour des nuits optimales.

Cette supposée régression (retour au lit à barreaux) n’atteint pas l’estime personnelle des enfants, mais plutôt celle des parents, qui, eux, voient cela comme un échec, et c’est dommage. Car parfois, il vaut mieux reculer d’un pas pour mieux vivre avec facilité la suite de l’apprentissage.

Comment procéder au transfert en quelques étapes : 
1.
Commencez par lui en parler. S’il réagit bien, il semble prêt. S’il pleure et/ou insiste pour garder son lit à barreaux, il n’est ­peut-être pas prêt. Rien ne presse. Par exemple, les parents de jumeaux font ce changement parfois autour de l’âge de 3 ans lorsque ­ceux-ci dorment très bien dans leur bassinette. Rien ne sert de mettre la charrue devant les bœufs… même si la moitié de votre entourage vous incite à faire ce changement.

2. Soyez joyeux. Des parents anxieux qui mettent tout plein de coussins autour du nouveau lit et montrent à ne pas en tomber rendent leur enfant inquiet. ­Faites-en plutôt une fête et ­faites-lui vivre l’expérience du nouveau lit en lui permettant de faire semblant d’y dormir et non pas d’y jouer. Car, lorsqu’arrivera le moment du transfert, votre enfant ne comprendra pas pourquoi vous insistez pour qu’il y dorme alors que vous lui aviez permis d’y jouer. Les enfants n’ont pas la logique des adultes : ce qui est une évidence pour nous ne l’est pas pour eux.

3. Il se relève ? ­Ramenez-le dans son lit aussi souvent que nécessaire. Dès la première soirée, certains enfants comprennent très vite qu’on leur a offert une nouvelle liberté : celle de se relever à souhait, et ils l’expérimentent ! 
Votre rôle consiste alors à ramener votre ­tout-petit dans son lit en jouant le rôle du parent fâché. Pas question de le border de nouveau ; il est mis au lit, et vous quittez la pièce. ­Assurez-vous de compter le nombre d’­allers-retours pour cette ­soirée-là. Si cela s’améliore de soir en soir, vous êtes sur la bonne voie.

Votre ­tout-petit se relève plusieurs fois malgré tout, et ce petit manège dure des heures ? ­Il faut maintenant passer à la prochaine étape ! ­Voici deux stratégies, une basée sur la motivation et l’autre sur la démotivation. Laquelle convient le mieux à votre enfant ? ­Il faudra expérimenter puisque nous n’avons pas reçu son petit manuel de réactions à sa naissance ! ­Dans les deux cas, il convient de nommer clairement vos attentes.

Par la motivation : le système de coupons
Vous lui remettez 4 coupons et vous lui dites que vous retournerez quatre fois à son chevet s’il vous appelle et que vous repartirez avec un coupon à chaque visite. Lorsqu’il n’y a plus de coupon, il n’y a plus de retour de la part du parent.
- Lorsque vous reprenez le dernier coupon, vous lui ­rappelez la consigne. Cela peut générer quelques pleurs, mais ils vont s’estomper au fur et à mesure.
- Le jour 2, vous lui donnez 3 coupons. Le jour 3, ­deux coupons et le jour 4, un seul coupon.
- Dans la majorité des familles, l’unique ­coupon est conservé quelques semaines, cela rassure les deux parties.
- Dans cette stratégie, l’enfant est motivé à rester dans son lit puisque le parent revient à son chevet, tel que l’enfant le souhaite.
Cependant, vous ne serez pas surpris d’apprendre que ce genre de stratégie ne fonctionne pas avec tous les enfants. Les plus audacieux, caractériels et créatifs vont tout de même se relever après le dernier coupon ou même avant. La stratégie par la démotivation devient alors nécessaire. Elle est, bien entendu, utilisée en dernier recours, puisqu’elle génère beaucoup de frustration chez l’enfant.

Par la démotivation : ­la stratégie des petits pieds
Elle consiste à lui dire que, s’il ne veut pas dormir, c’est d’accord ; tout ce qu’on lui demande, c’est de garder ses petits pieds dans son lit et que, s’il choisit de laisser ses petits pieds sortir du lit ­ET de la chambre, vous rendrez sa porte de chambre inaccessible (un parent maintient la poignée à l’extérieur de la pièce, ce qui en empêche l’ouverture).

­Faites-lui expérimenter ce choix avant la fin de la routine du dodo, en le faisant marcher jusque hors de sa chambre, en l’y ramenant, en fermant la porte de chambre (vous êtes dans la pièce avec lui), vous maintenez la fermeture de la porte en plaçant votre main sur la porte et l’encadrement de la porte, ainsi elle ne peut s’ouvrir, et vous l’invitez à tenter de l’ouvrir.

­Rappelez-lui que c’est son choix. S’il choisit de garder ses petits pieds dans son lit, la porte de sa chambre restera ouverte. S’il choisit de laisser ses petits pieds sortir de son lit ­ET sa chambre, la porte sera rendue inaccessible.

S’il se relève et sort de la chambre, vous le ramenez dans sa chambre sans dire un mot, et la porte est fermée ipso facto. Voyant que vous êtes cohérent (vos actions sont en lien avec vos mots), il sera évidemment très fâché et déchaînera toute sa colère… sur la porte, en nommant tous les mots de son vocabulaire qui vous rendent habituellement avenant ou très en colère.

Il faudra garder votre calme et ne pas répondre, sinon il risque d’être motivé à continuer. Au bout de 5 minutes, vous pouvez lui dire (au travers de la porte) que, s’il retourne se coucher, vous allez ouvrir la porte, mais que, s’il se relève, elle sera fermée de nouveau.

­Allez-y par bonds de 5 minutes supplémentaires jusqu’à son endormissement.

En l’espace de 3 nuits, il y a une nette amélioration. Il subsiste encore quelques résistances verbales, du style qu’il ne veut pas voir sa porte fermée. ­Répondez-lui que c’est lui qui décide : la porte reste ouverte s’il choisit de garder ses petits pieds dans le lit.

S’il sort de son lit uniquement, n’intervenez pas : il faut choisir ses batailles. Le plus important est qu’il n’ait rien sous la main pour jouer… ou se blesser.

L’enfant est alors démotivé à se relever puisqu’il perd le contrôle de l’ouverture de la porte et n’a rien qui le stimule s’il reste dans sa chambre.

­Rassurez-vous, chers parents, le changement de lit est souvent vécu de façon harmonieuse, mais mieux vaut être bien préparé pour les « au cas où » et, ainsi, éviter qu’une trop grande fatigue s’installe et qu’on perde de vue son gros bon sens !

Bon dodo !

BRIGITTE LANGEVIN
Conférencière
Experte en éducation au sommeil
Auteure de 10 livres, dont Sommeil – La boîte à outils : Stratégies et techniques pour bien dormir, publié aux Éditions de Mortagne.
Coach en PNL
De bonnes habitudes de sommeil, ça s’apprend !
www.brigittelangevin.com •  Facebook : bonneshabitudesdesommeil

Par Brigitte Langevin

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