Le langage à la base des apprentissages

La petite enfance est riche en apprentissages de toutes sortes. L’enfant apprend à prendre des objets, à se déplacer, à marcher, à manger, à courir… ­Il apprend également, dès sa naissance, à communiquer ses besoins, ses inconforts, ses joies. Puis, au fil des interactions avec ses parents et son entourage, il comprend et acquiert des mots. Si le développement du langage semble commencer avec les premiers mots, il n’en est rien. Une foule d’éléments se mettent en place dès la naissance.

L’apprentissage du code écrit (lecture et écriture) commence bien avant l’entrée à l’école. De nombreux éléments se mettent en place dans la période préscolaire et vont préparer l’enfant à faire ses apprentissages scolaires. Il y a, certes, des facteurs affectifs, familiaux et autres, mais ­concentrons-nous ici sur les facteurs langagiers. Plusieurs recherches démontrent que des habiletés de langage et d’éveil à l’écrit bien développées constituent des facteurs de protection dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Si l’on entend souvent parler des termes « langage oral » et « langage écrit » comme des entités différentes, il existe en fait un seul et même langage qu’on peut comprendre et exprimer dans diverses modalités (orale, écrite et gestuelle).

La modalité orale est la première que nous apprenons au contact de notre environnement. La modalité écrite nous permet de lire et d’écrire ce langage que nous comprenons et exprimons à l’oral. La modalité gestuelle, quant à elle, réfère majoritairement au langage des signes.

Stimuler le langage oral
Chez la plupart des enfants, la modalité orale s’apprend au contact de l’environnement, de façon assez implicite. Cela signifie que l’enfant qui évolue dans un contexte stimulant sur le plan langagier va apprendre le langage en baignant dans cet environnement de langage enrichi, et en interagissant avec ses proches et des personnes significatives. Il apprendra notamment à attirer l’attention de son parent, à communiquer ses besoins, à développer sa compréhension, à exprimer des mots, à combiner ces mots pour former des phrases et à élaborer son discours. Pour d’autres, ceux qui vivent des défis langagiers, il faudra rendre ce langage plus explicite afin de leur permettre de l’acquérir. Cela signifie qu’on devra pratiquer les concepts un à la fois et de manière répétitive pour aider l’enfant à les intégrer. Par exemple, pour un enfant qui a de la difficulté à comprendre les notions spatiales « sur, en avant, en arrière », on pourra pratiquer ces notions en jouant avec lui à la ferme ou avec des blocs, en rangeant les jouets, dans le bain, etc.

Quant à la modalité écrite, elle exige une mobilisation et un effort d’apprentissage de la part de tous les enfants. Comment alors faciliter l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, qui sont à la base de tous les apprentissages scolaires ?

Comme il est mentionné précédemment, il existe un seul et même langage qui se présente sous diverses modalités, et la modalité orale est plus facile à apprendre que la modalité écrite. Ainsi, ce que l’enfant ne comprend pas à l’oral, il ne pourra le comprendre à l’écrit (au cours de la lecture de textes ou de livres), et ce que l’enfant ne peut exprimer à l’oral, il ne pourra l’exprimer à l’écrit (dans ses phrases et rédactions de textes).

Comment alors aider son enfant à développer son langage en modalité orale dans la période préscolaire ? ­Il existe diverses façons, que ce soit en nommant vos actions, en jouant avec lui, en utilisant souvent les mêmes mots, en reformulant ses erreurs lorsqu’il en fait, en se plaçant à sa hauteur, etc. Les livres sont aussi une merveilleuse façon de favoriser le développement langagier : ils permettent l’épanouissement de l’imaginaire et exposent l’enfant à un vocabulaire et une structure de phrase plus complexes que ce qu’on utilise dans le langage familier oral. D’ailleurs, un enfant à qui on fait la lecture quotidienne de cinq livres dans la période ­0-5 ans serait exposé à plus d’un million de mots cumulés, par comparaison à un enfant à qui on ne fait pas la lecture dans cette même période.

Éveiller l’enfant au langage écrit
Les habiletés d’éveil à l’écrit constituent un autre facteur de protection dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Parmi ces habiletés, on trouve les conventions liées à l’écrit, l’apprentissage des lettres et la conscience phonologique. Les conventions liées à l’écrit réfèrent, par exemple, au sens d’un livre (endroit versus envers), au fait qu’il faut tourner les pages dans un certain sens, au sens de la lecture (de la gauche vers la droite, du haut vers le bas). C’est au contact des livres que l’enfant apprend ces conventions. En effet, rares sont les parents qui expliquent ces conventions explicitement à leur enfant. Il n’en demeure pas moins qu’un enfant qui se fait faire la lecture les apprend implicitement, sans même qu’on les lui explique. L’apprentissage du nom et du son des lettres fait aussi partie des habiletés d’éveil à l’écrit. L’apprentissage des lettres commence bien souvent par les lettres qui constituent le prénom de l’enfant. L’enfant aime découvrir que l’on peut écrire son prénom à l’aide de lettres, cela étant significatif pour lui. Enfin, les habiletés de conscience phonologique sont également incontournables lorsqu’on parle d’éveil à l’écrit. La conscience phonologique réfère à l’habileté à percevoir et manipuler les syllabes, les rimes et les sons.

Par exemple, si on joue avec l’enfant avec un bateau et un ballon, on peut en profiter pour lui faire remarquer que ces deux mots commencent pareil, par la même syllabe : « ­ba-teau, ­ba-llon, les deux mots commencent pareil, ils commencent par ba ». Les rimes sont présentes dans plusieurs livres pour enfants ; il suffit alors de mettre de la saillance sur ces rimes au moment de la lecture de l’histoire pour les faire remarquer à l’enfant. Les enfants aiment aussi trouver des mots qui riment avec leur prénom. On peut alors profiter d’un trajet en voiture pour trouver des rimes et pour montrer également des exemples de mots qui ne riment pas. On peut, de plus, profiter des jeux et des livres pour aider l’enfant à prendre conscience des sons dans les mots. Par exemple, on joue au restaurant avec ­Léa. On peut lui demander quel fruit commence par le même son que son nom : lime ou citron ? ­Quand on aide l’enfant à percevoir les sons dans les mots (ex. : feu), il est bien important d’y aller avec le son de la lettre (ex. : « fffffff ») et non le nom de la lettre (ex. : «èf»), puisque l’enfant n’a pas encore le référent écrit qu’on a.

Bref, lisez des histoires avec votre enfant dès son jeune âge pour stimuler la compréhension, le vocabulaire, la structure de phrase, le discours, et ­amusez-vous un peu plus tard à jouer avec les syllabes, les rimes et les sons. C’est dans le plaisir et dans la pratique que l’enfant développera des habiletés qui pourront favoriser l’apprentissage du code écrit.

CAROLINE GENDREAU
M. Sc., orthophoniste

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Par Caroline Gendreau

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