Le passage vers l'après diagnostic

Depuis un certain temps, vous vous doutez qu’il y a un « petit quelque chose » de différent chez votre enfant. Que vous ayez entrepris les démarches avec ouverture ou à reculons, tôt ou tard, l’heure sonnera pour le dévoilement des résultats de l’évaluation. S’il y a une chose que je sais, c’est qu’il est impossible de prédire quelle sera notre réaction à l’annonce du diagnostic. Que le processus ait duré six mois ou deux ans, une grande fébrilité accompagne généralement ce moment, ainsi que les jours – voire les semaines – qui suivent.

Je le sais parce que je suis passée par là personnellement il y a trois ans, mais également parce que j’ai soutenu de nombreuses familles dans ce passage depuis presque deux décennies. J’aimerais vous rassurer : les émotions que vous ressentirez à ce moment précis ne font pas de vous un bon ou un mauvais parent ! ­Vous avez le droit d’éprouver de la tristesse, de la colère, du découragement, de la culpabilité, de l’incertitude… ­Malgré tout l’amour qui nous habite et que nous portons à nos enfants, l’annonce officielle d'un diagnostic comporte son lot de bouleversements et de défis.

Se donner le droit d’accueillir ces émotions plutôt que de les refouler parce qu’elles sont dérangeantes vous aidera à traverser ce passage vers « l’après » diagnostic. Parce qu’il y a bel et bien un « après » ! ­Et je crois que, plus on en parle, mieux les familles traverseront cette période. Parce qu’elles sauront qu’elles ne sont pas seules, et que chaque étape est transitoire.

Un diagnostic, deux réalités…
Si deux parents (ou deux personnes) ont entrepris les démarches ensemble, cela ne veut pas dire qu’ils vivront l’annonce du diagnostic de la même façon. Les réactions peuvent varier et, même, être très opposées. Pour l’un, ce peut être une confirmation attendue depuis longtemps et pour l’autre, une surprise totale. Sans oublier le déni ou le refus du diagnostic.

Évidemment, cela amène une grande tension entre les deux parties. L’essentiel est de garder à l’esprit que chacun chemine à son propre rythme. Oui, cela peut être confrontant, et même déstabilisant par moments. Mais chaque individu impliqué a son propre cheminement à faire et éprouve des besoins différents. Pour l’un, ce sera la solitude, le silence, le recul. Pour l’autre, la proactivité, l’affirmation de soi, les initiatives… ­Et, entre les deux, des centaines de variantes possibles !

Je vous invite à observer votre propre ressenti, et à être à l’écoute de vos besoins personnels et familiaux. Il est facile de tomber dans le blâme et dans le jugement lorsque nous sommes submergés par les émotions. Prenez plutôt le temps de valider vos impressions, de nommer vos intentions, de partager vos besoins. Puis, trouvez des façons de répondre à vos besoins respectifs et de prendre du temps pour vous (ensemble ou séparément).

Je sais que ce n’est pas facile de s’occuper de soi ou de prendre du temps pour soi lorsque nos enfants ont des besoins plus importants. Mais, mieux vaut s’accorder ce temps maintenant plutôt que de se rendre à l’épuisement, non ?

Les fameuses montagnes russes
L’annonce du diagnostic est souvent suivie d’une période d’adaptation. Sa durée est très variable d’un individu à l’autre. Il risque aussi d’y avoir des moments plus difficiles à traverser. Il se peut que vous ressentiez une grande émotivité chaque fois que vous parlez du diagnostic de votre enfant.

Ce n’est pas nécessairement parce que vous n’acceptez pas le diagnostic. Et ce n’est assurément pas parce que vous n’aimez pas votre enfant ! ­Il arrive que toutes nos émotions s’entremêlent : la joie côtoie la tristesse, pendant que la colère laisse place à la culpabilité… C’est une nouvelle réalité à apprivoiser. Il y aura des moments de découragement, comme des moments de grande fierté ! ­Il y aura ­peut-être aussi des moments d’angoisse…

Quoi qu’il en soit, si vous avez des inquiétudes à ce sujet, n’hésitez pas à consulter un professionnel. Prendre soin de soi est essentiel, on ne le répétera jamais assez !

La réaction des proches
Rapidement, plusieurs parents ressentent le besoin de parler et de partager la nouvelle avec l’entourage. Le plus important, c’est vous ! ­Il n’y a pas de règle : c’est à vous de décider ! ­Vous choisissez à qui vous en parlez et comment vous en parlez.

Personnellement, j’ai écrit à nos proches un message, dans lequel j’expliquais brièvement ce qui nous avait amenés à entamer le processus d’évaluation et ce qui en était ressorti. Je ne cherchais pas leur approbation.

Je voulais simplement ouvrir la porte aux échanges, les rassurer et, surtout, leur rappeler l’essentiel : 

« ­Le plus important, c’est que vous soyez naturels avec lui ! ­Notre fils reste le petit garçon sensible, attachant, curieux et créatif qu’il est ! ­Il a les mêmes besoins que tous les enfants : être aimé, être entendu et être reconnu ! ­Nous accueillons cette nouvelle avec tout l’amour que nous portons à notre fils. Ce diagnostic n’a rien de dramatique. Avec un peu de soutien, il pourra déployer son plein potentiel et se réaliser pleinement. »

Si la plupart des gens réagissent bien et offrent leur soutien, il faut garder en tête que ce sera un choc pour certaines personnes et que leur réaction pourrait être vive et peu réconfortante…

« ­Voyons ! C’est impossible… ­Il est tout à fait charmant cet enfant ! »

« ­Je t’avais dit que ça n’apporterait que du mal, toute cette affaire d’évaluation. »

« C’est seulement toi qui as des difficultés avec lui. Ton enfant n’a rien de spécial. »

« C’est juste une question d’éducation. Vous n’avez pas été assez sévère avec lui. »

C’est pour cette raison que je suggère souvent aux familles de se préparer un peu : quelle est mon intention ? ­Quel est le message que je veux faire passer ? ­Pourquoi ­est-ce important pour moi ? À qui ­ai-je envie d’en parler ? ­Que ­vais-je répondre aux questions et aux commentaires des autres ? ­Qu’­est-ce que je voudrais que les gens retiennent ?

Cette démarche ne changera pas nécessairement la réaction de vos proches, mais elle devrait vous aider à vous sentir plus en confiance d’aborder le sujet avec eux !

Un enfant plus différent, mais comme les autres !
Le plus important, c’est votre relation avec votre enfant. Votre enfant est le même. Oui, il a reçu un diagnostic. Mais il « n’est pas » ce diagnostic.

Il est lui, avec sa personnalité, son caractère, ses qualités, ses défis, ses intérêts et ses particularités ! C’est important de continuer de le voir tel qu’il est, ­au-delà de son diagnostic. Votre perception de lui influencera la perception qu’il a et qu’il aura de ­lui-même. Il n’a pas besoin d’une « étiquette » pour se sentir bien : il a besoin de sécurité et d’amour, comme tous les enfants !

La plupart des parents se demandent s’il est préférable d’informer leur enfant de sa condition ou s’il ne vaut pas mieux « l’épargner » de tout ce que cela pourrait lui faire vivre. Comme pour nous, les enfants risquent d’être bouleversés à l’annonce de leur diagnostic. Mais cela peut aussi être un grand soulagement ! ­Nous pouvons leur en parler tout en tenant compte de leurs besoins et de leurs capacités. Des intervenants aussi soutiennent les familles à cette étape.

Je me souviens de la réaction de mon fils lorsque nous lui avons parlé d’autisme : « ­Merci maman ! ­Je savais que j’étais plus différent que les autres. Tu te souviens que j’avais essayé de t’en parler quand j’étais en maternelle ? »

Trois ans plus tard, il lui arrive d’en parler ouvertement ou, à l’inverse, de ne pas vouloir en parler du tout. L’important pour nous, comme avec nos autres enfants, est qu’il grandisse avec la confiance et l’espoir qu’il peut se réaliser pleinement. Ce n’est pas à nous de décider de ce qui est possible ou non. Nous essayons de respecter son rythme et de répondre à ses besoins. Nous souhaitons qu’il ait le courage d’être ­lui-même, et que l’autisme ne soit jamais une barrière à ses yeux. Voilà pourquoi, si c’était à refaire, je lui parlerais encore très ouvertement de son diagnostic !

Les premiers pas
Après les émotions, les questions et les réflexions, vient souvent le désir de bouger. Certaines personnes sont motivées par l’idée qu’il doit bien y avoir quelque chose à faire ou qu’il faut agir vite. Ce n’est pas toujours nécessaire d’agir vite sauf, bien sûr, si l’état de l’enfant le nécessite.

J’ai envie de vous inviter à commencer par vous renseigner. Ça peut paraître banal, mais c’est tellement utile ! ­Vous constaterez rapidement que, peu importe le diagnostic de votre enfant, il existe plusieurs courants de pensée ! ­Et, selon ses besoins, vous découvrirez qu’il existe également une offre diversifiée de services qui sont proposés aux familles.

S’il est facile de s’y perdre au début, faire vos recherches vous aidera à mieux comprendre et à vous faire une idée globale de ce qui est dit et proposé au sujet de la condition de votre enfant. ­Peut-être que cela vous amènera aussi à changer votre perception et à déconstruire certains préjugés que vous avez (nous en avons tous !).

Il y a, aujourd’hui, une grande offre de témoignages, de livres de référence, de blogues, de groupes de soutien sur les réseaux sociaux, de formations et d’ateliers. N’hésitez pas à contacter des organismes ou regroupements de votre région pour découvrir les ressources existantes : ils pourront vous orienter et, qui sait, vous offrir un soutien inestimable.

Ce qu’on ne vous dira pas…
Il y aura des moments où vous devrez insister pour être entendu. D’autres où vous devrez vous positionner fermement pour faire respecter les besoins de votre enfant. Il y aura des fois où vous devrez unir votre voix à celle des autres dans l’espoir de faire bouger les choses. Il y aura ces moments où vous voudrez baisser les bras, à bout de force. Et ceux où vous vous sentirez seul au monde.

Oui, parfois, il vous arrivera de pleurer devant les exploits de votre enfant… et peu de gens comprendront ! ­Oui, vous aurez parfois la rage au cœur pour quelque chose qui semblera insignifiant aux yeux des autres. Mais il y aura toutes ces victoires, petites et grandes, à célébrer ! ­Il y aura des alliés qui vous soutiendront et qui vous aideront à traverser les tempêtes plus difficiles. Il y aura des « anges » sur votre chemin – des parents, des amis, des voisins, des inconnus – qui poseront des gestes et qui vous redonneront espoir ! ­Et il y aura de l’amour, beaucoup d’amour !

Être parent d’un enfant différent, c’est tout ça ! ­Et la seule façon de cheminer dans l’univers de la différence, c’est un jour à la fois, un pas à la fois.

JOSÉE FILION
Éducatrice spécialisée, coach familial et conférencière
Membre du Réseau Nanny Secours depuis 2016

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Par Josée Filion

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