Régurgitations, vomissements et reflux: comprendre pour mieux soulager

Il est fréquent pour les nourrissons de régurgiter une partie du précieux lait qui leur est donné. Quand s’inquiéter et comment soulager nos petits de leur inconfort ?

De la naissance jusqu’à l’âge d’environ six mois, le nourrisson peut régurgiter une petite quantité de lait. De 5 à 10 ml de lait peut s’écouler durant le boire, au moment du rot ou après la tétée au sein ou au biberon. Ces régurgitations sont considérées comme normales par les médecins, et plus de 40 % des bébés vont avoir ces symptômes sans que cela nuise à leur croissance et à leur état général.

Les causes des régurgitations et vomissements légers sont très nombreuses : 
- la succion et la déglutition vigoureuses et rapides au sein ou au biberon ;
- un réflexe d’éjection du lait au sein puissant et constant durant la tétée ;
- l’immaturité du sphincter de l’œsophage ;
- la suralimentation : 
   • Le bébé (en tenant compte de son âge) mis au sein trop souvent entre les périodes de boire ou trop longtemps durant la tétée.
   • Une trop grande quantité de lait offerte dans le biberon et ­au-delà des besoins de bébé.

Malgré les inquiétudes tout à fait normales des parents, dans le cas où les régurgitations ne nuisent pas à la croissance, que le bébé ne souffre pas d’inconforts importants et qu’il n’y a pas de pleurs persistants, les médecins jugent qu’il n’y a pas lieu de consulter pour obtenir une médication.

Cependant, il est essentiel de porter attention au nourrisson qui, à chaque tétée, régurgite des quantités importantes de lait, et ce, pendant plusieurs jours. Il est alors indiqué de peser le bébé pour surveiller sa croissance et de consulter en cas de doute. Certains ­CLSC mettent en ­libre-service un ­pèse-bébé à la disposition des parents.

Vomissements en jet
Les vomissements en jet se manifestent par la sortie violente du contenu de l’estomac. Une grande quantité de lait peut être projetée très loin devant bébé. Lorsqu’ils sont répétés et jumelés à une croissance insuffisante, cela indique souvent une condition sérieuse. La perte de liquide causée par les vomissements persistants peut entraîner la déshydratation. Lorsque les vomissements contiennent du sang, si la fièvre est présente et que l’état général de bébé se détériore, cela devient une urgence et nécessite une consultation auprès d’un médecin.

Les vomissements en jet persistants peuvent être causés par différentes maladies obstructives ou pathologiques, telles que : 
- la sténose du pylore ou une occlusion intestinale ;
- une gastroentérite, une allergie alimentaire ou la prise de médicaments ;
- une méningite.

Reflux ­gastro-œsophagien (RGO)
Le reflux est la remontée du lait contenu dans l’estomac vers l’œsophage. Le lait présent dans l’œsophage peut possiblement être ravalé ou sortir sous forme de régurgitation légère. Ces régurgitations, considérées comme normales, surviennent durant le boire ou un peu après. Le reflux ­gastro-œsophagien (RGO) apparaît la plupart du temps entre les tétées. Il est accompagné d’inconforts modérés à sévères. Le reflux du contenu acide de l’estomac prédispose à une irritation de l’œsophage (œsophagite) et est souvent la cause des pleurs significatifs du nourrisson.

L’immaturité du sphincter de l’œsophage ou son fonctionnement anormal sont les causes les plus fréquemment citées en présence de ­RGO. De plus, la position sur le dos de bébé tend à aggraver le reflux, car elle entraîne la remontée du lait dans l’estomac vers l’œsophage.

Depuis la campagne « ­Dodo sur le dos », dans le but de prévenir la mort subite du nourrisson, on observe que la majorité des bébés passe beaucoup de temps sur le dos et pas assez sur le ventre au cours des périodes d’éveil ; cette situation peut être un facteur prédisposant à un ­RGO.

Afin de réduire le ­RGO et avant de consulter pour un traitement avec médication, certaines recommandations doivent être considérées : 
- éviter de suralimenter bébé ;
- au cours du boire, faire plusieurs pauses en plaçant bébé à la verticale contre l’épaule du parent ;
- tenir bébé en position verticale durant quelques minutes après le boire ;
- en période d’éveil, placer bébé sur le ventre durant quelques minutes ;
- élever bébé durant le sommeil en plaçant un oreiller sous le matelas à la tête du lit.

La médecine pédiatrique propose une médication pour les cas persistants ou sévères de ­RGO qui soulagera progressivement les symptômes de certains bébés. Cependant, pour un bon nombre de bébés, peu de changements sont observés par les parents. À la suite de cette constatation, la recommandation des médecins en général est de cesser la prise de médicaments et d’attendre que le reflux disparaisse progressivement de ­lui-même, au moment de l’introduction des aliments solides ou vers l’âge d’un an.

Traitement en ostéopathie
Afin de pouvoir expliquer les causes des régurgitations, des vomissements et du ­RGO, il est utile de s’intéresser au développement du système digestif durant la période fœtale. Une connaissance de l’anatomie du corps du bébé facilite également l’évaluation et le traitement en ostéopathie.

Durant la formation du système digestif, les organes du fœtus (œsophage, estomac, intestin et foie) subissent plusieurs rotations avant de prendre leur place définitive dans le corps du bébé. Les nerfs, les vaisseaux sanguins et les structures de soutien vont subir les mêmes déplacements puisqu’ils avoisinent les viscères. Le nerf vague est le principal plexus nerveux qui permet le fonctionnement des sphincters et du péristaltisme des organes. Lors des mouvements de rotation des organes, des contraintes peuvent avoir causé des tensions sur le trajet du nerf et occasionné des déséquilibres dans son fonctionnement.

L’ostéopathe qui se spécialise en pédiatrie doit avoir une expérience clinique et des connaissances approfondies pour agir avec compétence auprès du nourrisson. Au cours de l’évaluation, il porte un soin particulier dans l’examen du corps du bébé afin d’identifier les zones de contraintes et de tensions.

Durant le traitement, il procède à des manipulations délicates qui, dans bien des cas, va déjà apporter un certain soulagement au bébé.

Ma longue expérience clinique à titre d’ostéopathe spécialisée pour le bébé m’a amenée à toujours prendre le temps, lors de la rencontre avec les parents, de bien comprendre la condition de santé qui est particulière à leur enfant. J’élabore avec eux sur la dynamique des périodes de sommeil et d’éveil et du boire, sur les moments d’inconforts et de pleurs liés aux problèmes pour lesquels ils consultent. Les informations ainsi recueillies de même que l’évaluation globale du bébé vont me permettre d’appliquer le meilleur traitement et de prodiguer aux parents des conseils appropriés et spécifiques à leur enfant.

À la suite du traitement, il est essentiel d’instruire les parents en leur faisant des recommandations et en leur indiquant des exercices de positionnement de bébé au cours de ses périodes d’éveil. Ces exercices simples et faciles favorisent la réduction rapide des problèmes de santé de bébé tout en diminuant le nombre de visites requis en ostéopathie. En général, deux à trois traitements sont nécessaires pour traiter ce genre de problématique.

cAMILLE BERNARD
Ostéopathe DO - MSc Asymétries crâniennes

Références
• Vekemans G., L’ABC de la santé des enfants, ­Les Éditions ­La ­Presse, 2013
• Turgeon J., ­Dictionnaire thérapeutique pédiatrique ­Weber, 2e édition, ­Gaëtan ­Morin Éditeur, 2017
• Le ­Manuel ­Merck, traduction en français de la 18e édition, ­Merck ­Research ­Laboratories, 2006
Mieux vivre avec notre enfant de la grossesse à deux ans, ­INSPQ, 2017
• Sergueef N., ­Ostéopathie pédiatrique, ­Elsevier ­Masson ­SAS, 2006
• Barral J.P., ­Manipulation des nerfs crâniens, ­Elsevier ­Masson ­SAS, 2006
• Bernard C., ­Recherche qualitative sur la spécificité de la pratique clinique en ostéopathie pour le nourrisson, ­CEO, 2008

Par Camille Bernard

À lire aussi