Rêver de l'enfance sacrée

Aujourd’hui, en 2021, nous nous entendons tous pour dire que certains gestes sont dorénavant inacceptables. Donner une fessée à une femme, c’est de la violence. C’est inacceptable ! ­Donner une fessée à un animal, c’est de la maltraitance. C’est inacceptable ! ­Mais donner une fessée à un enfant, c’est de l’éducation … et c’est, ­semblerait-il, toujours acceptable ! ­A-t-on oublié les enfants ?

Il est maintenant reconnu que la fessée est nocive pour l’enfant et entache le lien affectif qu’il a avec son parent, puisqu’il aura tôt fait d’associer l’expérience douloureuse à celui qui la lui prodigue. De plus, l’acte enseigne à l’enfant à nier ses propres sensations et émotions. Cela l’enferme dans une coquille qui deviendra un passeport pour l’oubli de soi. Il lui est ensuite difficile de se construire la vie qu’il souhaite, quand il est déconnecté de ses ressentis et qu’il ignore ce qu’il veut.

Désormais, nous ne pouvons plus nous cacher derrière l’inconnu. Les recherches l’ont prouvé : il est très nocif de faire preuve de violence envers un enfant, quelle qu’en soit la forme. Toutefois, alors que nos spécialistes s’entendent pour citer toutes les problématiques qui suivent les violences physiques, la loi au ­Canada, quant à elle, permet toujours la fessée pour les enfants de plus de 2 ans. Bien que les coups à la tête, les gifles et l’utilisation d’objets sont interdits, il est néanmoins toujours permis de donner la fessée à son enfant. Si cela nous semble juste, nous pouvons poser des actes physiques sur notre petit, tant qu’il n’en résulte pas de blessures et que nous lui expliquons la raison pour laquelle il est puni. La fessée et les gestes physiques sont reconnus comme acceptables s’ils ne sont pas faits de façon dégradante et inhumaine. ­Suis-je la seule à considérer la fessée comme étant immanquablement dégradante et inhumaine ?

Je suis éducatrice et je vis dans un monde entouré d’enfants. Je sais très bien comment ils savent faire sortir le meilleur de ­nous-mêmes, mais aussi le pire. J’ai beaucoup de compassion pour tous ces parents dépassés par le comportement de leurs enfants et qui tentent tant bien que mal de conserver l’autorité dans la maisonnée, après une dure journée de boulot. Je ne souhaite pas les condamner, mais plutôt interroger. ­Serait-il possible d’investir plus d’efforts ou d’argent afin de leur fournir davantage d’outils, de services et de références, ce qui les soutiendra dans leur rôle parental ? ­Serait-il possible d’abord de rendre l’acte inacceptable socialement afin d’envoyer le message clair qu’ici, au ­Canada, nous avons choisi d’offrir aux petits une enfance sans aucune violence ?

Il me semble qu’il serait temps de penser aux enfants, maintenant. ­Offrons-leur un pays où il est inacceptable, voire inenvisageable, de faire preuve de violence envers eux. ­Donnons-leur un environnement où l’enfance est sacrée et respectée.

Caroline Langevin
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