Comment discuter de sujets délicats avec nos enfants ?

Psychologie

« ­Maman, mon ami m’a dit que nous étions en guerre ! » ­Nos enfants entendent toutes sortes de choses à la garderie et à l’école. Je dirais même qu’ils peuvent avoir accès à une tonne d’informations reliées à l’actualité simplement en regardant des vidéos. Peu importe la provenance de ces informations, comment ­devons-nous intervenir à propos d’un sujet délicat ?

Faites la part des choses
Certains sujets sont parfois délicats à aborder avec les enfants. Pourquoi ? Parce qu’en tant qu’adulte, il nous arrive de manquer de confiance quant à la manière de verbaliser des sujets chauds. Selon moi, lorsqu’il s’agit d’un sujet tel que la guerre entre la Russie et l’Ukraine, on doit user de notre filtre à café intérieur. Pour comprendre ce que cela signifie, demandons-nous quel est le rôle du filtre à café. C’est un dispositif permettant de faire passer de l’eau à travers le café qu’il contient et donc de retenir les particules solides pour obtenir notre fameux bon café. À partir de là, sachez qu’il faut user du même filtre face aux thèmes délicats qu’on aborde avec nos enfants, que ce soit la guerre ou la sexualité par exemple. Toutes les informations ne sont pas bonnes à dire, tout comme rester dans le néant non plus. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte, comme l’âge de l’enfant, le sujet, la provenance des informations, le moment, le contexte, etc. Je vous propose mon aide afin de filtrer de façon efficace.

Posez les bonnes questions
D’abord, on doit partir des informations que notre enfant possède au moment où il en parle. Pour ce faire, on reformule ses dires par des questions. Si l’enfant s’exclame : « Papa, c’est la guerre mondiale ! », vous pourriez répondre : « Sais-tu ce que c’est une guerre mondiale ? » Ou s’il s’écrie : « Maman, ils vont nous attaquer aussi ! », vous pourriez lui demander : « Qu’est-ce qui te fait croire qu’ils vont nous attaquer ? »

Lorsqu’on reformule le message de l’enfant sous forme de question, on évite de donner à celui-ci des informations qu’il ne possède pas encore ou dont il ignore l’existence. Lorsqu’un adulte parle d’un sujet quelconque, il en parle comme un adulte ayant des connaissances et de l’expérience. Le parent qui tente d’informer son enfant de la situation en lui donnant les grandes lignes sans nécessairement partir de ce que l’enfant sait ou pense devra justifier ses dires par d’autres réponses. Advenant que vous ayez un sujet délicat à traiter, il vaut mieux poser des questions à l’enfant sur des éléments qu’il fait ressortir afin de le faire réfléchir sur ses pensées plutôt que d’ajouter des informations qui auraient dû rester dans le filtre à café.

Faites vos recherches
Le filtre à café est aussi pertinent dans la sélection des médias à utiliser pour traiter un sujet délicat tel que la guerre. Il est préférable d’éviter de suggérer aux enfants qu’ils fassent eux-mêmes leurs propres recherches sur les médias sociaux ou sur Internet. Pourquoi ? Parce qu’ils auront accès à une tonne d’informations qui ne faisaient pas partie de leurs -questionnements initiaux. Il faut accompagner les enfants dans ce processus de recherche de manière à pouvoir rectifier leurs perceptions si celles-ci sont erronées. De nos jours, l’accès à l’information est assez facile pour les enfants, mais ils n’ont pas toujours la capacité de discerner le vrai du faux.

Gardez également en tête que l’idée n’est pas de les submerger, mais de répondre à leurs questionnements actuels. Vous vous demandez peut-être ce qu’il y a de mal à instruire nos enfants sur ce type de sujet et ainsi à remplir leur sac à dos de connaissances générales. Je répondrai qu’en ce qui concerne les thèmes comme la guerre, il y a des étapes à privilégier afin de permettre à nos enfants d’assimiler les informations, de forger leur propre réflexion sans aller trop vite. Chaque chose en son temps comme on dit.

D’ailleurs, il arrive que l’enfant souhaite poursuivre sa réflexion. Si on juge que la discussion va trop loin, on peut, dans une telle situation, en tant que parent, mentionner à notre enfant que, pour l’instant, cette partie ne le concerne pas et que ce sont des choses de « grands ». Il est important d’être à l’aise avec ce qu’on s’apprête à dire, sans quoi vaut mieux attendre et informer notre enfant qu’on reprendra cette discussion à un autre moment.

Faites-vous confiance
Enfin, il ne faut pas déduire qu’un enfant qui pose des questions sur un sujet plutôt délicat a besoin de tout savoir. L’enfant peut avoir capté une chose bien précise, la verbaliser, sans pour autant avoir des attentes très élevées. C’est pourquoi, selon moi, il faut partir de ce qu’il sait sans en ajouter. Au pire, il reviendra vous questionner quelques semaines ou quelques mois plus tard. Vous n’aurez qu’à faire la même intervention avec les nouvelles réflexions de votre enfant.

Advenant que vous soyez mal à l’aise de parler d’un sujet tel que la guerre avec votre enfant, peut-être que votre conjoint le sera davantage. Vous pouvez aussi vous informer auprès de l’école pour vérifier les interventions en lien avec un tel sujet. N’oubliez pas qu’il existe également des professionnels qui sont outillés pour atténuer le niveau d’anxiété chez les enfants. Rappelez-vous : filtre à café, reformulez vos questions et assurez-vous d’être à l’aise !

Christel Leblanc
Éducatrice spécialisée et fondatrice des services en éducation spécialisée
www.christelleblanc.comwww.centrevaxa.ca

Par ­Christel ­Leblanc

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